La classe dehors se prête à pléthore d’activités dans les différentes disciplines. L’enseignement des mathématiques, sciences, EPS, géographie… a déjà été abordé dans certains articles sur ce site (voir plus bas). Mais le français n’avait pas encore été évoqué en tant que discipline même si certaines facettes de cette matière, transversale par excellence, sont représentées : lecture, écriture, poésie, lexique…
Sans prétendre à l’exhaustivité, cet article propose donc de combler cette lacune en ciblant des apprentissages précis de l’étude de la langue : lecture, langage oral, phonologie, production d’écrits, grammaire… Cela à partir de jeux de cartes réutilisables, fabriqués au cours des activités, de jeux de course du type tag et déménageurs et de ressources glanées sur différents sites.
Lecture
quart d’heure lecture
Idéales pour se lancer tant elles sont faciles à mettre en place dehors, les séances de ce moment consacré à la lecture permettent de faire un premier pas dans la classe dehors. Elles peuvent avoir lieu dans la cour de récréation, un square ou un jardin proches de l’école où chaque élève choisit un endroit (contre ou dans un arbre, sur un tapis de jeux, un banc…) et s’installe confortablement. Chacun.e apporte son livre ou le choisit dans un lot fourni par l’enseignant.e. Une fois élèves et enseignants à l’aise dehors, le travail de lecture peut être approfondi et amplifié. Illustration
Entraînement lecture fluence
Lecture à voix haute en déambulation dans la cour, le parc, le jardin, la rue ou une place du quartier. Les élèves ont tous le même texte ou sont en groupes avec un texte différent. Le premier élève est le chef d’orchestre : il commence à lire et à marcher, les autres le suivent en file indienne, lisant à voix haute et à l’unisson. Lorsque le chef d’orchestre a terminé la liste de mots, le texte ou le paragraphe qu’il doit lire, il se place à la fin de la colonne. L’enfant suivant devient le chef d’orchestre.
les sentiers de la lecture dehors
La fabrique des communs pédagogiques (FabPéda) propose cinq séances clef en main pour lire dehors. D’une durée d’une à trois heures, ces séances sont organisées en trois chapitres et s’adressent aux élèves du premier et du second degré.
Chapitre 1 : Lire Dehors collectivement Séance primaire : Construire un itinéraire de lecture en extérieur. Séance secondaire : Lire collectivement l’information climatique
Chapitre 2 : Lire Dehors dans l’espace public Séance interdegré: Organiser un coin lecture en extérieur.
Chapitre 3 : Lire Dehors en mouvement Séance primaire : Le chemin de mémoire. Lire (et retenir !) une poésie dehors. Séance secondaire : Une lecture itinérante : cartographier la poésie
Litténature
La question climatique et l’extinction de la biodiversité ont une place particulière dans les propositions de la FabPéda. C’est le cas aussi des ouvrages sélectionnés par l’académie de Poitiers dans le document Litténature – C2-C3 qui présente des pistes de travail à partir de leur lecture. Une belle ressource pour les séances du 1/4 d’heure lecture dehors !
Langage oral
Dehors, les découvertes, les sensations, les interactions sociales multiplient les occasions de conversations spontanées. Contrairement à la classe, où, comme le fait remarquer M. Laparra, la permanence de l’écrit est généralement supérieure à l’immédiateté de l’oral, l’enseignement dehors favorise une didactique de l’oral centré sur la langue (1). A l’oral prédominent, entre autres, répétitions, reformulations, emphase, présence de connecteurs, rupture syntaxique, etc. (2) Les imperfections ou l’imprécision des énoncés donnent l’occasion à l’enseignant de construire sur le vif, avec l’élève et particulièrement lors des moments de jeu ou d’exploration libre, des chaînes de reformulation qui « confrontent les élèves à des énoncés de plus en plus élaborés au plan cognitif et au plan linguistique. »(1)
(1) L’oral, un enseignement impossible ? M. Laparra, Pratiques, OpenEdition Journals
(2) Les interactions orales, leviers aux apprentissages ? Ifé, Centre Alain Savary
Jeu de com’ mais pas que…
Lexique et précision du langage, communication orale en français ou dans une autre langue, prise en compte de l’importance de la consigne, land art, … Le jeu Fais comme moi sur le site canadien Enseigner dehors, fait travailler les élèves dans tous ces domaines et peut aussi être réalisé dedans !
Phonologie
Collecte de mots dans lesquels on entend un son donné. Le son à rechercher figure sur une carte tirée au hasard par un.e élève. Le travail peut être individuel, en binôme ou en équipe. Trouver un ou des objets différents dont le nom comporte le son recherché. L’objet sera si possible un élément inanimé (moins dangereux pour les p’tites bêtes !) mais on peut dessiner les objets intransportables ou les animaux.
Prolongement et variante:
Associer l’objet trouvé à l’écriture de son nom qui peut figurer sur une carte ou dans un texte, être écrit ou recopié.
Réaliser cette activité selon le principe du jeu des déménageurs. Chaque équipe doit collecter un maximum d’objets dans un temps donné et les rapporter un à un. Une seule fois le même objet, l’idée n’est pas de faire un tas de cailloux ! Quoique…
A propos de caillou, ce mot, dont déjà le pluriel présente une jolie exception grammaticale, offre un large champ lexical et figure dans de nombreuses expressions. On le trouve dans des ouvrages pour la jeunesse, des poésies, des chansons, des contes et même une pièce de théâtre ! Ce n’est pas pour rien qu’un article et des fiches pédagogiques lui sont consacrés ici !
Production d’écrits
La production d’écrits, réalisable dans toutes les disciplines, ouvre à une infinités de perspectives. Quelques pistes de travail sur le lexique, la poésie, les sciences, les mathématiques…
Lexique, ordre alphabétique, abécédaires
Collecter des éléments de nature et les classer dans l’ordre alphabétique de leur nom et les associer à son écriture. Le travail de collecte vu plus haut, les cartes-mots utilisées à d’autres moments sont réinvestis. L’abécédaire peut être thématique comme l’Abécédaire de la forêt, du square, du jardin avec des croisements entre eux. Pour un travail sur les abécédaires, voir l’article Classe dehors au Ver Têtu (2) : Abécéd’air nature (illustration) et sur le site de La petite salamandre une fiche pédagogique : Faire un abécédaire des fruits et légumes.
On trouve une activité sur l’ordre alphabétique en cycle 3 sur le padlet Classe dehors – cycle 3 qui, de fait, pourra enrichir le jeu des cartes de noms ou groupes nominaux réutilisables dans d’autres activités dont la tag ci-dessous.
D’autres jeux de cartes proposés sur ce site, comme Fleurs de printemps (ici), Plantes aromatiques (là), peuvent être utilisés dans ce type d’activité sur le lexique.
Pour un travail dans la rue voir les cartes sur Les mots de la rue dans l’article Atelier : Faire classe dehors (aussi) dans la rue.
Énigmes
Individuellement, en binôme ou en groupe, les élèves écrivent des énigmes à résoudre par les autres. Les énigmes peuvent être thématiques, dans une discipline donnée (sciences, mathématiques…), en lien avec un sujet déjà étudié et présent, si possible, sur le lieu de l’activité : arbres, fleurs et autres végétaux, insectes, caractéristiques du lieu où l’on se trouve… Quelques exemples :
- De combien de planches sont constitués les bancs ?
- Combien de bouleaux y a-t-il dans le jardin ?
- Combien de pattes a un insecte ?
- Je me déplace sur mon ventre et je porte ma maison sur mon dos. Qui suis-je ?
- Qu’est-ce qu’un coléoptère ?
- L’araignée est-elle un insecte ?
- Mon 1er est un mot qui indique la négation, mon 2ème est un rongeur, mon 3ème tombe du ciel et mon tout est un abri portatif.
- …
Dans un 2ème temps on passe à la résolution des énigmes.
Cartes d’identité
Élaborer la carte d’identité d’un animal ou d’un végétal oblige à en identifier les caractéristiques et la famille. Les informations qu’elle contient dépendent du niveau des élèves. Des exemples de cartes d’identité de plantes sont à retrouver dans l’article consacré aux plantes aromatiques.
écriture de haîkus
La classe dehors est propice à l’écriture de haïkus, ces courts poèmes d’inspiration japonaise en lien avec la nature, les saisons, les 5 sens et les émotions. Leur structure de 3 vers respectivement de 5, 7, et 5 pieds comprenant l’irruption de quelque chose d’inattendu facilite leur écriture.
Déroulement possible :
Des haïkus ont déjà été lus aux élèves qui en ont repéré les caractéristiques. Si ce n’est pas le cas, la séance commence par cette découverte. La classe est assise en cercle, pendant quelques minutes les élèves sont concentrés sur leurs sensations et leurs observations. L’enseignant.e recueille leurs impressions spontanées et note le vocabulaire utilisé. Pour commencer, la création du haïku est collective. Puis les élèves écrivent un haïku par petits groupes (sur l’ardoise, le cahier d’essai, le cahier de classe dehors), employant ou pas le vocabulaire noté, ou le dictent à l’adulte, jusqu’à ce qu’ils soient en capacité d’en produire individuellement. La séance se termine par la lecture (non obligatoire) des haïkus.
Progression :
Les élèves de maternelle pourront créer seulement un poème en trois parties qui évoque quelque chose de la nature et traduit une émotion.
Avec les plus grands, outre le respect de la structure, le lien avec la nature et les émotions, on peut insister sur l’irruption de quelque chose d’inattendu, de bizarre.
Photos-problèmes mathématiques
L’écriture d’un problème mathématique implique précision et clarté. Les informations visibles sur la photo n’ont pas besoin d’être écrites. On est dans la lecture d’image.
Démarche possible :
Pour faire entrer les élèves dans l’activité, l’enseignant.e utilisera des photos existantes et posera des questions pour inciter les enfants à inventer des problèmes, ce qu’ils feront ensuite à partir des photos qu’ils auront prises.
Lors d’une balade botanique ou mathématique dans un parc, un square, les rues du quartier ou au marché, les enfants prennent des photos d’éléments mathématiques (ou de fleurs dans le cas d’une balade botanique). De retour en classe, des photos sont imprimées et utilisées sous forme de collage ou de jeu de cartes pour élaborer des situations problèmes qu’il leur faudra rédiger.
Dans un 2ème temps, l’exercice pourra être complexifié par la rédaction de ces informations qui remplacera alors la photo. Dans certains cas, l’activité comprend le réinvestissement de connaissances lexicales comme le nom des fleurs dans l’illustration ci-dessus.
Reprise de l’article Maths et mouvements et un grand merci au site M@ths en-vie !
Grammaire
Nature des mots
Classement suivant leur nature suivant leur nature des mots en rapport avec le milieu, collectés lors d’autres activités. Ce travail permet de réutiliser les abécédaires.
Le nom et le déterminant
Jeu de la tag (1) : une équipe est celle des déterminants, l’autre celle des noms communs. Noms et déterminants sont secrets. Les noms doivent attraper un déterminant qui leur correspond. Lorsque les enfants s’attrapent, ils vérifient la correspondance. Si elle est correcte, ils gagnent, écrivent leur réponse sur une ardoise et vont chercher un nouveau déterminant et un nouveau nom. (Adaptation de la proposition d’Amandine Caudron, enseignante, école Saint-Paul )
(1) Jeu de poursuite, un joueur est désigné comme la « tag » et doit alors courir après les autres joueurs jusqu’à ce qu’il réussisse à en toucher un, qui devient alors la « tag ». Cette règle de base connaît un nombre incalculable de variantes.
Accord verbe-sujet
L’inépuisable jeu de la tag peut être adapté pour travailler l’accord verbe-sujet. Des cartes (encore !) sont proposées sur le padlet Classe dehors – cycle 3. Sur ce même padlet on trouve aussi une course aux verbes utilisant les mêmes cartes… ou d’autres !
L’adjectif
Les élèves sont debout. L’enseignant propose un nom : voiture par exemple. Chaque élève doit proposer un adjectif qui qualifie le nom, ne pas proposer un adjectif qui a déjà été dit. Si on a perdu on s’assoit. On peut resserrer le jeu en interdisant les couleurs, etc. Une extension du nom qui n’est pas un adjectif peut être proposée (une voiture à pois = complément du nom, la voiture que je regarde = proposition relative), en profiter pour aborder la notion. Cette activité peut être ritualisée pour réinvestir et consolider la notion. A chaque sortie, le travail sur les adjectifs peut être repris en qualifiant d’autres éléments du paysage : les arbres, les immeubles, les boutiques, la végétation… (d’après ICEM34)
Pour travailler l’accord de l’adjectif, adapter le jeu de la tag ci-dessus.
Pronoms personnels
Un jeu du type « déménageurs » pour travailler la pronominalisation :
- 4 zones distinctes correspondant aux pronoms personnels il, elle, ils, elles. Plus les zones seront espacées, plus l’activité sera dynamique.
- Cartes-groupes nominaux (provenant d’activités précédemment réalisées, de textes lus en classes, de documents connus…)
- Une feuille par élève ou par binôme, divisée en 4 parties correspondant aux pronoms
Les élèves tirent une carte GN, vont la déposer le plus rapidement possible dans la zone du pronom correspondant, inscrivent le GN sur leur feuille dans la case du pronom et vont chercher une autre carte.
L’activité s’arrête lorsque toutes les cartes-GN ont été placées. La validation se fait collectivement. On peut faire un comptage des points par carte GN bien placée.
On trouve une autre version de cette activité sur le site de la FabPéda.
Quelques sources et ressources
– La fabrique des communs pédagogiques (FabPéda)
– Le padlet Classe dehors – cycle 3
– Concernant les haïkus : un article très complet sur le site de Profs en transition : Dehors poussent les haïkus ! Un exemple de méthodologie sur le site de La classe d’Alicia et Découvrir les haïkus avec ses élèves.
Quelques articles de ce site sur les autres disciplines :
– Mathématiques : Maths et mouvements, Faire des mathématiques dehors, Balade mathématique dans le quartier et bien sûr M@ths en-vie
– Géographie : Enseigner dehors et géographie : la sortie de terrain
– Sciences : L’homme a mangé la terre et des ressources Sciences et environnement
– EPS : Faire de l’EPS dehors, Classe dehors : 2 temps et 3 mouvements