L’exposition Théodore Rousseau, La Voix de la forêt au Petit Palais à Paris, du 5 mars au 07 juillet 2024 est une belle occasion d’enrichir le travail sur l’arbre réalisé en classe dehors et dedans. Ce thème inépuisable a souvent été abordé sur ce site (voir plus bas), en particulier dans le billet Les arbres dans les arts que cet article sur le travail de T.Rousseau vient prolonger.
Indépendance, réalisme et sensibilité
Théodore Rousseau, dont Baudelaire disait qu’il était « Un naturaliste entraîné sans cesse vers l’idéal » est un peintre paysagiste français du milieu du 19ème siècle. Figure symbolique de l’école de Barbizon, il incarne la lutte de la génération de 1830 contre les conventions et les règles académiques. Sa carrière fut marquée, des années durant, par les attaques de la critique et par son exclusion du Salon. Sa détermination à préserver son indépendance artistique et sa résistance face à une opposition sévère ont construit sa légende de « grand refusé ». Rousseau exprimait un profond attachement à la nature et se consacrait à capturer la beauté brute des paysages, rejetant les normes esthétiques en vigueur à l’époque. Ses œuvres ont finalement obtenu une reconnaissance bien méritée, inspirant de nombreux artistes1.
Dès 1829, Théodore Rousseau se jette à corps perdu dans l’observation, et la représentation, de la nature, dans l’étude passionnée et même angoissée des effets de la lumière sur cette nature qu’il entend pénétrer jusqu’en ses profondeurs les plus intimes. 2
1 D’après https://www.universalis.fr/encyclopedie/theodore-rousseau/
2 France Archives Théodore Rousseau Paris, 15 avril 1812 – Barbizon (Seine-et-Marne), 22 décembre 1867
Portraits d’arbres
L’artiste arpente inlassablement la forêt de Fontainebleau et dresse de véritables portraits d’arbres qui deviendront sa signature. Il scrute leur structure organique, la ligne de leurs branches, la forme de leurs nœuds. Les figures humaines sont réduites au minimum, et ce sont les arbres qui font office d’acteurs principaux. Il place le spectateur non pas en surplomb du paysage mais au cœur de cet écosystème 3.
Sortie de forêt à Fontainebleau, 1848-1850
La voix des arbres
J’entendais les voix des arbres ; les surprises de leurs mouvements, leurs variétés de formes et jusqu’à leurs singularités d’attraction vers la lumière m’avaient tout-à-coup révélé le langage des forêts 4
Rousseau appréhende les arbres non en tant qu’espèces, mais comme des individus, dont il faut dévoiler « tout le système de vie ». Il les écoute, entend leur voix, comprend leur langage, cherchant à percer le secret de leur puissance et de leur énergie sereine 5.
Le Rageur. Vieux chêne sur les bruyères des gorges d’Apremont (Musée du Louvre)
4 D’après Sensier, son biographe https://francearchives.gouv.fr/fr/pages_histoire/39199
5 D’après https://www.petitpalais.paris.fr/sites/default/files/content/press-releases/cp_theodore_rousseau_0.pdf
La cause des arbres
Une conscience aigüe de la mise en danger des forêts se développe chez les artistes, les critiques et les écrivains dans un contexte d’industrialisation croissante. La forêt de Fontainebleau est alors victime de coupes au cordeau et de reboisements inadaptés, organisés par la toute jeune administration forestière. En effet, dans le pays qui s’industrialise, la forêt est soudainement mise au service de la production manufacturée. On abat les vieux arbres pour planter des pins rectilignes dans une logique économique (hélas toujours de mise aujourd’hui !) que combat l’artiste.
Rousseau souhaite dénoncer ces « crimes » à travers ses œuvres. Il choisit notamment un titre qui frappe les esprits en reprenant l’épisode biblique du Massacre des innocents (1847) qui représente une scène d’abattage d’arbres en forêt.
En 1852, il se fait le porte-voix de la forêt au nom de tous les artistes qui la peignent et écrit au comte de Morny, ministre de l’Intérieur de l’époque. Son combat trouve sa résolution dans la création, en 1853, de la première réserve naturelle au monde, sous le nom de « réserve artistique », officialisée en 18616.
Aujourd’hui il est question d’une « artialisation » de la forêt de Fontainebleau au nom de laquelle sont réalisés des travaux d’aménagement et d’abattage qui posent question. Voir ici et là. Une fiche consacrée à la forêt de Fontainebleau dans le cadre de l’article Sortir avec les élèves dans et hors Paris est également en préparation.
6 https://www.petitpalais.paris.fr/sites/default/files/content/press-kits/dp_rousseau.pdf
Prolongements, sources et ressources
Autour de l’Exposition Théodore Rousseau, La Voix de la forêt au Petit Palais
- Dossier de presse Février 2024
- En écho à la rétrospective présentée au Petit Palais à Paris, exposition « Se souvenir de Théodore Rousseau », Barbizon, 9 mars, 16 juin 2024 (dossier de presse)
Articles DE ce site sur le thème de l’arbre
Pour amorcer, prolonger, approfondir un travail sur le thème de l’arbre, quelques articles publiés sur ce site :
Autres (re)sources
- France Archives Théodore Rousseau Paris, 15 avril 1812 – Barbizon (Seine-et-Marne), 22 décembre 1867
- Fiche Wikipedia de l’artiste
- Encyclopédie Universalis
- Théodore Rousseau, Zadiste de Barbizon, Musair
- Beaux Arts : Théodore Rousseau en 2 minutes, Solène de Bure
- La forêt de Fontainebleau : une nature monumentale, un monument naturel ?, Perspectives, actualité en histoire de l’art, Chantal Georgel, Open Edition
- Massacre au bulldozer en forêt de Fontainebleau, Reporterre, tribune, 09/02/2017